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Article original de Dennis Wittrock.

Explorer l’autogestion comme structure organisationnelle pour les Startups

Cet article décrit comment les startups peuvent mieux répondre à leur besoin de structuration organisationnelle en connaissant les alternatives à la hiérarchie conventionnelle, et quand effectuer un changement délibéré de système d’exploitation.

Pour la plupart des startups, il y a des étapes marquantes dans leur développement lors desquelles des décisions fondamentales doivent être prises. Au début, les fondateurs peuvent se rencontrer à l’université ou se réunir avec des amis pour explorer une idée d’entreprise. Après une période d’expérimentation, ceux qui n’échouent pas dans les premiers stades (ce qui est le cas de la plupart des startups) atteignent un stade où l’adéquation produit-marché augmente.

« A l’aide , nous avons besoin de structure ! »

C’est là que les fondateurs de startups entrent dans un dilemme commun : à mesure que l’équipe grandit, la complexité de l’organisation augmente, et il devient clair qu’une sorte de hiérarchie intermédiaire soit structurellement nécessaire. Dans le même temps, cela remet en question la base du succès antérieur de l’entreprise, son agilité, sa proximité et sa décontraction interpersonnelle, et le sentiment de faire partie d’une famille que l’on s’est choisie.

A ce stade, en tant que fondateur vous vous dites de manière pragmatique : « Et puis zut, au final, nous n’avons pas le choix, alors faites venir les dirigeants à plein temps, les managers, les « chefs de … », etc. », et laissez le destin suivre son cours, tout en vous jurant de pratiquer le « servant leadership » et d’autres nobles idéaux de leadership, et de ne jamais vous laisser séduire par le côté obscur du pouvoir. Bonne chance !

Un choix qui n’en est pas un

À proprement parler, la décision en faveur de la hiérarchie managériale classique n’est pas vraiment une décision, car une « décision » suppose que je puisse choisir entre au moins deux options viables. Laisser l’organisation glisser vers un chaos sans espoir n’est pas une option viable, et la plupart des startups en sont donc réduites à la devise « fermer les yeux et passer au travers » et à imposer la hiérarchie managériale mal aimée, avec tous ses enchevêtrements interpersonnels, en espérant que tout finira par s’arranger.

La bonne nouvelle est qu’il existe en fait une alternative viable au management hiérarchique classique. Elle s’appelle l’autogestion.

La bonne nouvelle est qu’il existe en fait une alternative viable à la hiérarchie classique du management – et qu’il y a donc un vrai choix à faire, à condition d’être conscient de cette alternative. Elle s’appelle l’autogestion, ou l’auto-organisation, et elle gagne en visibilité dans les tendances entrepreneuriales. Mais malheureusement, la majorité des entreprises sont encore relativement ignorantes de cette alternative ou n’osent pas (encore) franchir le pas.

Une véritable alternative : L’autogestion avec Holacracy

La variante de l’autogestion que nous privilégions chez Xpreneurs, tout comme chez Sémawé s’appelle Holacracy. Il s’agit d’une pratique robuste d’autorité distribuée entre pairs, sans managers traditionnels, développée en 2006 par Brian Robertson et la société HolacracyOne. Ce système est désormais pratiqué dans des milliers d’organisations dans le monde. Ses règles sont codifiées dans la « Constitution Holacracy ». Le but de cet article n’est pas d’expliquer Holacracy, mais de souligner le fait qu’il existe une alternative réaliste à la hiérarchie classique. La décision sur le système d’exploitation implique alors un vrai choix entre deux options viables.

La question du bon timing

En supposant que l’autogestion en Holacracy soit considérée comme le bon choix, quand est-ce que le système d’exploitation alternatif doit être introduit dans l’organisation ? On peut généralement distinguer trois phases dans la croissance d’une startup:

  1. les premiers jours candides où tout le monde fait partie de la Happy Startup Family ;
  2. la phase où l’adéquation produit-marché a été optimisée, ce qui conduit à une poussée de croissance et à une complexité accrue ;
  3. une phase de consolidation où l’organisation doit digérer structurellement sa croissance (si elle ne veut pas mourir de congestion).

Phase 1 : la Happy Start Up Family

Dans la phase 1, on n’a généralement pas conscience que la poussée de croissance de la phase 2 va arriver et entraîner un besoin de structure. Les gens pensent qu’ils pourront toujours travailler dans leur garage avec leurs amis. Bien qu’il serait idéal de construire l’organisation sur une base durable avec Holacracy à ce stade précoce, d’autres choses sont plus urgentes :

  • Vérifier l’hypothèse selon laquelle les produits de l’organisation sont nécessaires.
  • Développer des flux de revenus pour disposer d’une marge de manœuvre financière suffisamment longue pour mettre un produit sur le marché
  • Embarquer les bonnes personnes avec les bonnes compétences.

Dans la phase 1, le besoin d’autogestion n’est pas élevé, car vous travaillez toujours en bonne intelligence avec vos collègues (et toutes les tâches nécessaires sont effectuées), et il n’y a généralement pas assez de ressources financières pour obtenir une formation Holacracy approfondie et un coaching professionnel (bien qu’il puisse y avoir des exceptions). Ce n’est donc généralement pas le bon moment.

Dans le même temps, des opportunités substantielles sont manquées. Dès que l’on se pose la question de savoir quel travail doit réellement être fait, qui est responsable de quoi, et qui prend quelles décisions, on aurait la possibilité de prendre ces décisions en utilisant Holacracy. La plupart des fondateurs de startups créent inconsciemment et involontairement une pratique qui nuira plus tard à l’organisation, et à laquelle ils ont souvent essayé d’échapper – ironie du sort – en créant une autre entreprise.

Phase 2 : Maturité du marché

Même dans la phase de maturité du marché (2), par définition une phase turbulente, un changement radical du système d’exploitation de l’organisation n’est pas recommandé car un tel changement nécessite un investissement en temps et en énergie. Or, ce n’est pas viable à cette étape, car le téléphone n’arrête pas de sonner. En outre, l’augmentation soudaine de la complexité ne devient perceptible que vers la fin de cette phase de croissance, ce qui signifie que le déficit structurel va soudainement devenir aigu. Ce n’est donc pas non plus le moment idéal.

Mais d’un autre point de vue, il s’agit du premier véritable coup de stress pour l’entreprise. Si vous pouvez vous appuyer sur de solides pratiques d’autogestion dès les premières étapes, il y aura probablement beaucoup moins de dommages collatéraux.

Phase 3 : Consolidation

Dans la phase 3, vous avez maîtrisé la première ruée de clients et reconnu le besoin de structure. À ce stade, la plupart des fondateurs choisissent la voie de la hiérarchie managériale classique. Mais, comme nous l’avons appris précédemment, d’autres voies sont possibles : il est également possible de suivre l’exemple d’un nombre croissant d’entreprises pionnières du monde entier qui choisissent l’autogestion. Dans la phase 3, vous disposez de ressources suffisantes, vous avez un produit qui fonctionne et vous savez qu’une structure organisationnelle appropriée ne se construira pas toute seule. À partir de ce plateau, vous pouvez soit dériver passivement dans le flux de la hiérarchie traditionnelle, soit reconstruire complètement votre organisation avec l’autogestion.

Conclusion

Si vous appréciez les qualités typiques des startups telles que l’agilité, la prise de décision décentralisée, l’autonomie maximale et la subsidiarité, et que vous souhaitez passer à l’échelle supérieure, mais que vous ne voulez pas renoncer à la clarté des rôles et des processus, un système d’autogestion cohérent tel que l’Holacracy est une option à envisager sérieusement dans la dernière phase de consolidation.

Toutefois, si vous pensez systématiquement à l’avenir, vous envisagerez la question du choix du système dès le début, car elle se posera inévitablement d’elle-même. Plus vous mettez en place les alternatives tôt, plus il est facile d’établir un nouveau modèle de collaboration qui peut résister aux changements dans l’organisation (recrutement, changement d’échelle etc…) sans répondre de manière purement réactive au besoin de structure en établissant un modèle hiérarchique de management parce que « c’est comme ça que fonctionne une entreprise. »

Au contraire, le management traditionnel hiérarchique n’est pas une fatalité que l’on doit subir. Mais on ne peut prendre une vraie décision que lorsqu’on connaît de vraies alternatives.

Cet article a été publié en allemand le 9 février 2022 par Denis Wittrock sous le titre « Selbst-Management als Organisationsstruktur für Startups » sur le blog Xpreneurs.

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