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L’adoption de l’Holacracy est un apprentissage. On apprend de nouveaux processus, de nouvelles règles de jeu. Mais ce n’est pas parce qu’il y a des règles que Holacracy est un processus rigide. Le piège serait de tomber dans une interprétation des processus qui vous empêche d’agir. Dans cet article nous explorons 5 clés pour soutenir votre pratique des réunions en Holacracy et ouvrir le champ des possibles. Car n’oubliez pas, la première règle de l’Holacracy est : “Tout ce qui n’est pas interdit est autorisé”.

1.  Tenir des tactiques en dehors des Cercles

La tactique est un processus de réunion qui permet de traiter efficacement des sujets opérationnels. En Holacracy il y a des réunions tactiques régulières du cercle :

  • Tous les membres sont invités.
  • Il y a une phase de synchronisation avec le check-list, les indicateurs et la revue des projets.

Mais ces réunions ont lieu si et seulement si c’est utile pour votre cercle de se réunir ! Dans certaines organisations qui ont une pratique depuis plusieurs années, les tactiques de cercle tendent parfois même à disparaître.

Et puis il y a les tactiques hors cercle :

  • Vous invitez seulement les rôles dont vous avez besoin pour traiter le sujet, même si vous n’êtes que 2 cela fonctionne.
    Exemple : une tactique pour coordonner une réponse à un appel d’offre, une tactique pour l’organisation d’un événement, une tactique pour définir les prochains sujets de votre blog …
  • Dans ce cas, le facilitateur et le secrétaire se désignent volontairement pour la réunion.
  • Après le tour d’inclusion, passez directement à l’établissement de l’agenda et au traitement des points en gardant le processus en tête : chacun apporte ses points, les rôles interpellés répondent, prennent des projets et les 5 pistes sont toujours là pour vous aider à mieux comprendre l’attente de l’autre.

Dans cette perspective “tactique” devient synonyme de “réunion opérationnelle”. Dans notre expérience nous avons constaté que le temps de réunion était divisé par deux, simplement car nous allons plus vite à l’essentiel. C’est donc une méthode particulièrement efficace dans une période chargée.

Vous n’avez pas forcément besoin de logiciel pour cela, peut-être que noter vos projets sur un papier ou votre téléphone suffira. Vous pouvez même tenir des tactiques à la machine à café, rien ne l’interdit dans la constitution !

Adopter le processus de la réunion tactique pour tous types d’échange opérationnel c’est surtout adopter une posture d’écoute et de coopération, centrée sur le besoin de l’autre.

Le but est de mieux cerner l’attente de l’autre et d’y répondre le plus directement possible. Et quand ce sera votre tour, vous disposerez de la même écoute.

Si il y a une chose à retenir c’est : les membres des cercles obligatoirement invités mais ne sont pas obligés de venir si quelque chose est plus prioritaire pour la gouvernance, mais pour la tactique ne vous limitez pas et invitez qui vous voulez !

2. Il est possible de discuter en réunion tactique

Et oui, c’est possible, si cela répond à votre besoin bien sûr. Attention tout de même à ne pas retomber dans le travers d’une discussion fleuve où chacun vient mêler son sujet à celui des autres.

Voici quelques questions que le facilitateur peut poser pour éviter cela :

  • À quels rôles tu t’adresses ?
  • Est-ce que tu as vraiment besoin de l’avis de tout le monde ou simplement ceux qui en ont un ?
  • Après quelques prises de parole, demander : où en es-tu de ton point ?
  • As-tu besoin d’entendre d’autres personnes ?
  • Sachant que tu as toute autorité dans ton rôle pour décider par toi même à quel rôle poses-tu la question ?

En tant que facilitateur, restez attentif à ce qu’aucun autre point ne vienne s’introduire dans le point d’origine. Si c’est le cas, proposez aux personnes d’apporter un autre point à l’ordre du jour.

En tant que porteur du point vous pouvez aussi vous demandez :
Est-ce que le sujet concerne plusieurs rôles ? Si il ne concerne qu’un rôle et que vous avez vraiment besoin d’échanger avec lui, organisez une tactique à 2.

3. Prenez soin des individus avec le processus de réunion de gouvernance

Le processus de gouvernance est parfois perçu comme rigide et inhumain. C’est un processus qui repose sur des étapes à respecter. Les premières fois ce processus peut paraître rigide car il nous fait complètement sortir de nos habitudes de discussion.

Or ce processus a justement été pensé pour prendre soin à la fois des individus et du collectif. C’est un équilibre toujours recherché en Holacracy comme le précise cet article.

Ce processus permet :

  • D’exprimer pleinement un ressenti, une intuition, une volonté de changement… En tant que proposeur vous pouvez prendre le temps d’exprimer votre proposition sans être interrompu. Le facilitateur protège cet espace des critiques ou contre-arguments qui pourraient être adressés avant même que vous ayez pu aller au bout de votre idée.
  • De poser toutes les questions de clarification nécessaires. A cette étape, en tant que participant, vous pouvez prendre le temps d’éclaircir les choses. Les questions de clarifications sont puissantes et sont parfois plus utiles qu’une suggestion ou un avis.
  • Que chacun exprime son avis à tour de rôle, sans être interrompu. Le fait que la discussion ne soit pas en “ping-pong” permet à chacun d’exprimer ses idées. Pour les plus timides c’est précieux de savoir que l’on ne va pas être interrompu dans sa prise de parole même si on hésite ou si on marque un silence. Pour les plus à l’aise, cela permet de canaliser également l’espace qui peut être pris naturellement.
  • D’intégrer les objections. Dans des discussions classiques il est parfois difficile de faire entendre sa voix surtout si votre opinion est minoritaire. Le processus de décision intégrative porte une attention particulière aux signaux faibles détectés par les participants à la réunion. Si vous avez le moindre doute sur la décision le facilitateur est là pour vous aider à qualifier votre préoccupation. Si il s’avère que c’est une objection vous aurez la possibilité de discuter avec le proposeur pour intégrer votre suggestion à la proposition. Et ce processus sera répété autant de fois qu’il le faudra pour qu’il n’y ait plus d’objections à la proposition. C’est très précieux car pour une fois ce n’est pas la majorité qui l’emporte !

De manière plus générale, c’est une critique qui est souvent adressée à Holacracy. Je vous recommande l’article de Brian Robertson à ce sujet.

4. Soutenez toutes les propositions, qu’elles soient déjà prêtes ou pas du tout

Lors des réunions de gouvernance les membres n’ont pas besoin d’arriver avec une proposition déjà prête. La constitution ne dit rien de tel. Une personne peut arriver en réunion de gouvernance avec une proposition en tête ou bien avec juste la volonté que quelque chose change.

Exemple : “Ma proposition c’est que ça change” ou bien “Je propose de changer ce fonctionnement”.

Les seules exigences pour une proposition sont celles décrites dans l’article 5.3.1 de la Constitution :

“Pour qu’une Proposition soit considérée comme valide, le Proposeur doit pouvoir :

  • décrire une Tension à laquelle la Proposition répondrait pour l’un des Rôles du Proposeur ; et
  • donner un exemple d’une situation réelle, passée ou présente, qui illustre cette Tension ; et
  • fournir une explication raisonnable de la manière dont la Proposition réduirait la Tension dans cet exemple.”

Alors évidemment arriver avec une proposition rédigée fait gagner du temps mais c’est aussi un piège car en tant que proposeur il est parfois plus difficile d’être à l’écoute des contributions des autres quand la proposition est déjà bien ficelée.

5. Le tour d’inclusion comme boussole pour la réunion

Si il est vu comme une simple étape de formalité alors oui le tour d’inclusion ne sert à rien. Mais à votre avis, pourquoi chaque réunion en Holacracy commence avec un tour d’inclusion (et termine avec un tour de déclusion) ?

Quand les réunions s’enchaînent et que l’on passe d’un sujet à l’autre sans interruption, il est parfois difficile de se concentrer, d’être focus sur le sujet de la réunion.

Le tour d’inclusion c’est comme un sas. C’est une transition pour se rendre disponible au temps de travail qui débute. Il introduit une dimension sensible et humaine dans ces réunions.

Il permet à chacun d’exprimer son état actuel. Pouvoir dire “Je ne me sens pas très disponible, le sujet est loin pour moi mais j’arrive”, c’est permettre à son cerveau de se concentrer.

C’est aussi une information précieuse pour le reste du groupe. Si je sais que telle personne ne se sent pas bien ou n’est pas très disponible, je vais aussi mieux comprendre ses réactions.

Dans un tour d’inclusion, chacun reste libre de dire ce qu’il veut et personne n’a le droit de réagir. Pour éviter un tour de “ça va”, en tant que facilitateur vous pouvez poser la question :

“Partagez une chose qui vous permettra de vous rendre disponible à cette réunion”.

Il est intéressant que les plus expérimentés dans la pratique fassent attention à être particulièrement modélisant dans les débuts de la pratique. Être modélisant lors d’un tour d’inclusion, il suffit d’être concis, d’être authentique, donc probablement dire des choses un peu différentes selon les jours et qui corresponde à la réalité de votre situation.

Que vous soyez facilitateur ou participant à une réunion ces 5 clés sont là pour vous aider à vous approprier les processus et à les vivre pleinement. Bonnes réunions !

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