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Article traduit de Chris Cowan par Juliette Brunerie
https://blog.holacracy.org/holacracy-basics-understanding-objections-d87b579d00d1

Certains aspects de la pratique d’Holacracy demandent plus d’attention, notamment les objections et le test des objections qui nécessite du temps pour les comprendre réellement. Rien ne vaut l’expérience. Nous espérons que ces quelques exemples et métaphores vous aideront à mieux vivre cette expérimentation.

Note : considérez cet article comme une 1ere approche du sujet de l’objection. Si vous rechercher des apports plus avancés, voici l’article en anglais : “Une meilleure façon de tester les objections

Qu’est-ce que la gouvernance ?

Pour comprendre ce que sont les objections, il est important de commencer par appréhender quel genre de décisions peuvent être prises dans une réunion de gouvernance en Holacracy. La gouvernance est représentée comme une carte unique des attentes récurrentes, restrictions et domaines d’autorité de l’organisation. Une sorte de carte routière.

Ce qui signifie qu’une proposition est une suggestion pour mettre à jour cette carte. Lorsqu’une personne lève une objection en réunion de gouvernance, elle dit “Je pense que faire cette modification serait néfaste pour la carte de notre organisation”.
A chaque objection, chacun se demande “Comment peut-on abîmer une carte ?” Et bien, si vous la rendez inexacte, confusante ou pas claire.

Lorsque quelqu’un objecte une proposition en disant “Nous n’avons pas le temps de faire cela”, un des membres peut demander “Une carte alloue-t-elle des ressources de temps” ? La réponse est “non”. Une carte des USA ne détermine en rien comment s’y prendre pour se rendre de New York en Virginie, ou les ressources nécessaires pour un voyageur pour faire son trajet. La carte ne fait que montrer des chemins possibles.

De la même façon, la gouvernance d’une organisation n’est qu’une carte qui explique où peuvent être adressées les demandes. Voilà pourquoi on ne prend jamais de décision opérationnelle en réunion de gouvernance. L’unique fonction de la gouvernance est de mettre à jour la carte de l’organisation pour pouvoir agir toujours plus rapidement chaque jour.

C’est aussi pour cela que les réunions opérationnelles servent à travailler “dans l’organisation” et la gouvernance à travailler “sur l’organisation”. Pour la plupart des gens, cette distinction n’est pas intuitive, elle est pourtant importante à saisir si vous souhaitez comprendre le principe de l’objection.

Qu’est-ce qu’une objection?

En Holacracy, une objection est une raison logique qui prouve que la proposition cause du tort. Dans ce contexte une raison est un argument qui peut être évalué logiquement sans nécessiter une observation ou expérience concrète. . Par exemple, l’argument “J’ai faim, j’ai donc besoin de manger” est logiquement cohérent même si vous n’avez aucune idée de si j’ai vraiment faim (vs une raison telle que “J’ai faim donc j’ai besoin de nouvelles chaussures”).

Une raison connecte simplement les points entre une cause et son effet. C’est ce que l’ont entend lorsqu’on dit que le Facilitateur “ne juge pas” les arguments. Le facilitateur ne juge pas si la raison correspond à la réalité, mais bien si la raison telle que présentée paraît saine (i.e que le facilitateur ne juge pas l’argument raisonnable, mais seulement si cela paraît raisonné).

Un facilitateur ne peut jamais vraiment être sûr si une objection est valide ou non. Il peut seulement tester comment les choses sont exprimées. Il ne teste pas le tort causé mais si l’objecteur croit qu’un tort va être causé. Je mets cela en lumière car il est important de se rappeler qu’in fine, la clarté de l’objection est déterminée par la capacité de l’objecteur à exprimer sa tension (même si parfois on aimerait que les autres lisent dans nos pensées!)

Techniquement parlant, n’importe quel argument donné par un objecteur est par définition une objection. Cependant, une objection valide doit exprimer comment la proposition (critère 2) va nécessairement créer (critère 3) du tort (critère 1) à l’un des rôles énergisé par l’objecteur (critère 4). (Les 4 critères sont présents dans le processus de test des objections)

Qu’est-ce qu’un tort ?

Bien que chaque critère de la constitution de l’Holacracy mentionnés ci-dessus offrent une vraie distinction et méritent sa propre analyse, pour ce récapitulatif, je ne vais me concentrer que sur le 1er critère qui dit :

Si les tensions restaient non traitées, la capacité du cercle à exprimer sa raison d’être ou à mettre en œuvre ses redevabilités serait dégradée. Donc, la tension n’est pas juste déclenchée par une meilleure idée ou une potentielle future amélioration mais bien parce que la proposition ferait reculer le cercle dans sa capacité actuelle. Avec l’intention de ce critère, “réduire la clarté” est considéré comme une dégradation de la capacité du cercle, alors que “échouer à clarifier” ne l’est pas. Cela veut dire que bien souvent, la majorité des objections, telles que présentées par l’objecteur ne sont pas des raisons pour lesquelles la carte se dégraderait. La meilleure façon de comprendre est de regarder des exemples concrets et essayer de détecter ce qui ne fonctionne pas avant de lire mon analyse.

*Attention : Lever une objection non valide n’est jamais une mauvaise chose. Cette information est pour illustrer le propos. Une personne pratiquant Holacracy ne devrait jamais ressentir de pression pour amener une objection valide. N’utilisez jamais les informations qui suivent pour pré-filtrer votre objection. Tout comme une proposition, toute information peut être le point de départ d’une objection.

“Nous devons ajouter X à cela….” ou “Cela appartient au rôle Finance”

Il n’y a que des solutions, pas de problèmes. Rappelez vous qu’une objection doit décrire un tort. Quand cela se présente lorsque je facilite, je dis généralement “Cela semble être une super solution, mais à quel problème ?” J’ai besoin de savoir “Quel est le problème si nous n’appliquons pas ce que tu proposes ?”

“Je n’aime juste pas cette proposition,” ou “Je ne suis pas d’accord avec la proposition.”

Il n’y a rien de mal à avoir un avis marqué mais nous ne cherchons pas l’accord de tous (ie un consensus). Quand vous déjeunez avec vos collaborateurs, vous n’avez pas besoin de recueillir l’accord de chacun pour décider de ce que vous allez commander à manger pour vous-même. De la même façon, une proposition est une solution que vous commandez pour résoudre votre propre tension. Que se passe-t-il si vous voulez un sandwich au thon mais la personne à côté de vous ne peut pas supporter l’odeur du thon ? Dans ce cas votre commande va l’impacter (serait donc une objection valide)

“Nous n’en avons pas besoin », ou « Cela ne résout rien »

Ces déclarations décrivent la neutralité, pas le préjudice. En ce qui concerne une réunion de gouvernance, une absence d’amélioration de la carte est parfaitement acceptable. Les objections sont des raisons pour lesquelles la proposition rendrait la carte pire qu’elle ne l’était avant le début de la réunion.

“Oui cela va causer du tort”

Il est évident que cette réponse ne nous renseigne en rien, mais c’est pourtant très commun, lorsqu’un facilitateur un peu stressé, a raté le tort initialement décrit par l’objecteur et a tendance a demander mécaniquement “Est-ce que cela va causer du tort ou est-ce inutile ou incomplet ?”. L’objecteur ayant déjà décrit le tort a tendance à répondre à cette question bizarre un effrayant “Oui, du tort”. Sans tenir compte de pourquoi cela se produit, le facilitateur a besoin de clarifier cette objection “Quel tort vois-tu ?” “J’ai dû le rater, quel est le tort causé déjà ?”

“Ce n’est pas le vrai sujet”

Il est possible qu’il y ait un ou plusieurs autres sujets importants à discuter, mais cela n’est pas notre préoccupation pendant le tour d’objection. Nous travaillons une proposition à la fois à l’exclusion de tous les autres sujets, sachant que l’objecteur peut simplement ajouter un point à l’ordre du jour pour qu’on s’en occupe. Imaginez un chirurgien en pleine intervention. Il réalise qu’il a oublié de fermer la porte de son garage. Il est important de s’en occuper, mais plus tard. Dans les réunions conventionnelles, l’ordre du jour est souvent composé de sujets à discuter par le groupe, plutôt que des tensions à traiter individuellement, c’est donc un malentendu commun. Amenez simplement un nouveau point à l’agenda, il sera traité ensuite comme les autres !

La gouvernance est comme une carte. Les objections sont des raisons logiques à exprimer. Une objection valide doit décrire le tort causé !

 

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