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En tant que fondateur et dirigeant : comment en es-tu arrivé là ?

Au départ je viens du monde de l’éducation populaire, je suis un ancien animateur socio-culturel. Je me reconnais très fortement dans les valeurs de l’économie sociale et solidaire. Ce qui me porte vraiment c’est

“comment tendre collectivement vers un but socialement utile, créer un projet collectif où chacun trouve sa place selon un modèle économique participatif ?”.

En 2008, dans le cadre d’une de mes missions, je découvre l’association des devenus sourds et malentendants de la Manche (l’ADSM Surdi 50). Il s’agit véritablement d’une rencontre avec un univers dont j’ignorais tout jusque-là. Je croyais que ces personnes arrivaient bien à communiquer grâce à la langue des signes et à la lecture labiale, voire qu’avec des aides auditives les conditions de l’échange étaient réunies. Or j’apprends à ce moment-là que non : 99% des personnes malentendantes ne communiquent pas en langue des signes et les aides auditives ne résolvent pas vraiment leur problème ! La communication entre personnes entendantes et malentendantes pose de véritables difficultés qui leur compliquent vraiment la vie.

Je m’empare alors de ce sujet : comment contourner cet obstacle et créer des conditions favorables de communication entre personnes entendantes et malentendantes ? C’est ce qui m’anime encore aujourd’hui !

Peux-tu nous raconter ta rencontre avec Holacracy ?

En 2012 je crée la Scop le Messageur avec mon acolyte Jean-Luc, papa d’un fils autiste et sourd. Nous partageons la même vision et son expérience de vie est précieuse. Malgré tout, nous avons beaucoup de choses à apprendre : notre expertise est alors en construction sur les techniques liées au son, à la gestion des prises de parole et sur les méthodes qui permettent d’écrire à la vitesse de la parole…

Nous nous lançons, nous osons et nous avançons par itérations, en utilisant nos échecs comme source d’apprentissages.

Entre 2012 et 2017, l’équipe fluctue entre 2 et 4 personnes, et chaque prestation est une occasion de progresser. Nous collaborons régulièrement aussi avec des indépendants.

A partir de 2019, je vais devoir continuer l’aventure seul, Jean-Luc doit arrêter progressivement son activité. A cette époque, l’entreprise est très vulnérable, et manque de stratégie. Moi-même j’ai la croyance que si nous réalisons un travail de qualité, alors les clients doivent arriver seuls jusqu’à nous.

Et puis je participe à une AG des SCOP et j’assiste à cette occasion, à la présentation d’un DU de Business Management, de Paris Dauphine, conçu pour les dirigeants de Scop et de Scic. Je décide à ce moment-là de me former pour acquérir les outils qu’il me manque et me permettre de prendre confiance en moi.

Je m’inscris au DU en 2018 et c’est à ce moment-là que je découvre l’Holacracy. Un des intervenants nous parle d’Holacracy pour nous dire que ça ne fonctionne pas. Et grâce à des collègues de SCOP qui connaissent déjà, ça devient un vrai sujet de débat que nous abordons en soirée, après les cours ! Tout ça me donne envie de creuser cette piste, sans penser qu’ Holacracy est forcément ce qu’il nous faut.

Je suis à la recherche d’un management qui permette le respect et l’épanouissement des individus dans leur vie professionnelle et personnelle.

    Qu’est-ce que tu as entrepris pour aller plus loin avec Holacracy ?

    J’ai suivi un MOOC de l’Université Du Nous sur la gouvernance partagée, j’ai lu le livre de Frédéric Laloux « Reinventing organizations” et la bande dessinée “changer de technologie managériale avec l’Holacracy”. Puis j’ai découvert Sémawé pendant le confinement en suivant les webinaires proposés et j’ai lu votre livre “Histoires singulières d’une Scop en Holacratie”.

    Pour moi c’est évident que j’ai besoin d’évoluer dans ma manière de manager. Si je continue à pratiquer comme je sais le faire, je ne serai pas innovant par rapport à la responsabilisation des membres de l’équipe, ni exemplaire en matière de gouvernance partagée. Et j’ai vraiment l’ambition de permettre à notre SCOP de développer ses activités selon un modèle coopératif exemplaire !

    Pour en savoir plus sur Holacracy :
    20 questions fréquentes sur ce qu’est Holacracy
    5 questions sur l’adoption d’Holacracy

    Et finalement tu décides d’embarquer ton équipe dans l’aventure Holacracy : peux-tu nous raconter ton cheminement de leader d’entreprise ?

    Depuis 2008 nous avons acquis beaucoup d’expérience et affiné notre méthodologie pour transformer les situations hostiles en situations accessibles pour les malentendants.

    Le DU Business Management m’a aidé à ficeler le projet, à le traduire en plan d’actions. J’ai compris qu’il fallait que l’on s’appuie sur des fonctions supports pour nous développer. J’ai alors décidé de recruter même si nous n’avions pas encore le chiffre d’affaires pour, de manière à nous laisser une chance de croître.

    Malgré tout ça, l’année 2019 a été très chaotique : Jean-Luc a officiellement quitté la SCOP et, à la même période, les difficultés se sont enchaînées. J’ai vraiment cru mettre la clé sous la porte, le bateau était à la dérive !

    Finalement c’est la crise sanitaire qui a changé la donne. Cette période était tellement compliquée pour les malentendants : se retrouver en télétravail, en visio, puis revenir au travail avec des masques ; s’adapter à ces conditions était insurmontable. Notre activité a alors très vite décollé. En parallèle, le service communication a travaillé à nous rendre plus visibles. Nous avons pu à nouveau recruter des fonctions supports, de plus en plus indispensables pour l’organisation de la SCOP.

    En 2020, lors d’un séminaire d’équipe au cours duquel nous travaillons le projet de la SCOP, nous partageons le constat suivant : nos savoir-faire sont bien calés et nous voulons grandir pour impacter davantage de monde ! Et nous voulons réaliser tout ça selon un modèle coopératif exemplaire, qui permette l’épanouissement de chacun.

    Notre activité croît et nous serons une vingtaine d’ici la fin 2022. Un certain nombre de questions émergent avec la croissance de l’équipe : comment faire pour que les nouveaux se sentent intégrés, soient force de proposition ? Le management me prend plus de temps (coacher, conseiller, soutenir chacun), notre climat social est bon, nos process s’affinent, et je sais que j’ai besoin et envie de continuer à être sur le terrain : notre fonctionnement doit évoluer pour me permettre de trouver cet équilibre et pour que chacun trouve sa place.
    En plus de mes lectures dont j’ai déjà parlé, j’ai rencontré Aliocha au congrès national des SCOP à Rennes cette année. J’avais déjà l’intuition qu’Holacracy était une bonne piste pour nous et nos échanges ont fini de me convaincre :

    si je veux vraiment être innovant pour ma structure et avec notre ambition d’exemplarité, nous devons emprunter le chemin d’Holacracy !

    Qu’est-ce qui te motive et te rend enthousiaste dans ton envie de transformation avec Holacracy ?

    Comment est-ce qu’on entreprend ensemble collectivement pour tendre vers notre but ?

    Je suis ultra enthousiaste à l’idée d’expérimenter un fonctionnement qui va dans le sens de l’autonomie pour agir.

    C’est ce qui guide notre action pour nos clients également : nous visons l’autonomie des personnes malentendantes. Je serai heureux de permettre d’atteindre cette cohérence entre ce que nous vivons en interne et notre manière de faire pour nos clients et les bénéficiaires de nos prestations.

    J’ai vraiment envie de sortir de la vision de la pyramide avec laquelle on a grandi. Entreprendre ensemble, avec chacun des possibilités, être audacieux ensemble !

    Je souhaite que chacun des individus de notre SCOP expérimente un mode de fonctionnement humain qui transforme sa vision du monde, sa relation aux autres et que chacun assume les responsabilités qu’il peut prendre. Je souhaite que chacun puisse s’épanouir, dire ce qu’il a à dire et puisse être lui-même. C’est valable pour moi aussi bien-sûr !

    C’est ça la promesse avec Holacracy et j’ai envie de me donner les moyens d’accompagner assez les équipes pour y arriver. Je pense que le chemin sera long et va nécessiter de l’exigence et de l’implication.

    Je regarde tout ça avec joie et grand bonheur ! Peu d’entreprises ont pris ce chemin, c’est aussi enthousiasmant d’être parmi les pionniers et de profiter de ceux qui partagent leur expérience.

    Holacracy fait partie d’un tout. C’est un pas de plus vers le but de notre SCOP.

    Quels problèmes cherches-tu à résoudre ?

    Par exemple, actuellement des décisions ne sont pas prises car chacun pense que c’est à d’autres de les prendre, au gérant ou autre.

    J’ai vraiment l’intuition que si on se donne les moyens, nous allons gagner en efficacité de fonctionnement.

    L’équipe est en attente aussi, elle a envie de monter des marches ! Moi-même je n’ai pas parlé directement d’Holacracy avec l’équipe, mais Aliocha est intervenu en réunion d’équipe. Depuis, je vois que l’équipe emprunte volontiers les livres à disposition, celui de Laloux, la bande dessinée et le livre de Sémawé. Je viens de terminer les entretiens annuels et j’ai sondé chacun : il y a de l’envie ou au pire des personnes qui n’en pensent pas grand-chose, mais pas de frein détecté à ce stade.

    Je pense que nous avons atteint une bonne taille d’équipe pour mener ce chantier. C’est sûr que nous sommes accaparés par tous nos sujets et en pleine croissance. Ça rajoute une difficulté supplémentaire mais ça sera structurant à bien des niveaux et notamment pour les relations entre collègues. Je ne souhaite pas différer ce sujet et c’est aussi pour cela que je ne tergiverse pas sur l’accompagnement et le coaching !

    Et finalement tu décides d’embarquer ton équipe dans l’aventure Holacracy : peux-tu nous raconter ton cheminement de leader d’entreprise ?

    Depuis 2008 nous avons acquis beaucoup d’expérience et affiné notre méthodologie pour transformer les situations hostiles en situations accessibles pour les malentendants.

    Le DU Business Management m’a aidé à ficeler le projet, à le traduire en plan d’actions. J’ai compris qu’il fallait que l’on s’appuie sur des fonctions supports pour nous développer. J’ai alors décidé de recruter même si nous n’avions pas encore le chiffre d’affaires pour, de manière à nous laisser une chance de croître.

    Malgré tout ça, l’année 2019 a été très chaotique : Jean-Luc a officiellement quitté la SCOP et, à la même période, les difficultés se sont enchaînées. J’ai vraiment cru mettre la clé sous la porte, le bateau était à la dérive !

    Finalement c’est la crise sanitaire qui a changé la donne. Cette période était tellement compliquée pour les malentendants : se retrouver en télétravail, en visio, puis revenir au travail avec des masques ; s’adapter à ces conditions était insurmontable. Notre activité a alors très vite décollé. En parallèle, le service communication a travaillé à nous rendre plus visibles. Nous avons pu à nouveau recruter des fonctions supports, de plus en plus indispensables pour l’organisation de la SCOP.

    En 2020, lors d’un séminaire d’équipe au cours duquel nous travaillons le projet de la SCOP, nous partageons le constat suivant : nos savoir-faire sont bien calés et nous voulons grandir pour impacter davantage de monde ! Et nous voulons réaliser tout ça selon un modèle coopératif exemplaire, qui permette l’épanouissement de chacun.

    Notre activité croît et nous serons une vingtaine d’ici la fin 2022. Un certain nombre de questions émergent avec la croissance de l’équipe : comment faire pour que les nouveaux se sentent intégrés, soient force de proposition ? Le management me prend plus de temps (coacher, conseiller, soutenir chacun), notre climat social est bon, nos process s’affinent, et je sais que j’ai besoin et envie de continuer à être sur le terrain : notre fonctionnement doit évoluer pour me permettre de trouver cet équilibre et pour que chacun trouve sa place.
    En plus de mes lectures dont j’ai déjà parlé, j’ai rencontré Aliocha au congrès national des SCOP à Rennes cette année. J’avais déjà l’intuition qu’Holacracy était une bonne piste pour nous et nos échanges ont fini de me convaincre :

    si je veux vraiment être innovant pour ma structure et avec notre ambition d’exemplarité, nous devons emprunter le chemin d’Holacracy !

    Qu’est-ce qui te motive et te rend enthousiaste dans ton envie de transformation avec Holacracy ?

    Comment est-ce qu’on entreprend ensemble collectivement pour tendre vers notre but ?

    Je suis ultra enthousiaste à l’idée d’expérimenter un fonctionnement qui va dans le sens de l’autonomie pour agir.

    C’est ce qui guide notre action pour nos clients également : nous visons l’autonomie des personnes malentendantes. Je serai heureux de permettre d’atteindre cette cohérence entre ce que nous vivons en interne et notre manière de faire pour nos clients et les bénéficiaires de nos prestations.

    J’ai vraiment envie de sortir de la vision de la pyramide avec laquelle on a grandi. Entreprendre ensemble, avec chacun des possibilités, être audacieux ensemble !

    Je souhaite que chacun des individus de notre SCOP expérimente un mode de fonctionnement humain qui transforme sa vision du monde, sa relation aux autres et que chacun assume les responsabilités qu’il peut prendre. Je souhaite que chacun puisse s’épanouir, dire ce qu’il a à dire et puisse être lui-même. C’est valable pour moi aussi bien-sûr !

    C’est ça la promesse avec Holacracy et j’ai envie de me donner les moyens d’accompagner assez les équipes pour y arriver. Je pense que le chemin sera long et va nécessiter de l’exigence et de l’implication.

    Je regarde tout ça avec joie et grand bonheur ! Peu d’entreprises ont pris ce chemin, c’est aussi enthousiasmant d’être parmi les pionniers et de profiter de ceux qui partagent leur expérience.

    Holacracy fait partie d’un tout. C’est un pas de plus vers le but de notre SCOP.

    Quels problèmes cherches-tu à résoudre ?

    Par exemple, actuellement des décisions ne sont pas prises car chacun pense que c’est à d’autres de les prendre, au gérant ou autre.

    J’ai vraiment l’intuition que si on se donne les moyens, nous allons gagner en efficacité de fonctionnement.

    L’équipe est en attente aussi, elle a envie de monter des marches ! Moi-même je n’ai pas parlé directement d’Holacracy avec l’équipe, mais Aliocha est intervenu en réunion d’équipe. Depuis, je vois que l’équipe emprunte volontiers les livres à disposition, celui de Laloux, la bande dessinée et le livre de Sémawé. Je viens de terminer les entretiens annuels et j’ai sondé chacun : il y a de l’envie ou au pire des personnes qui n’en pensent pas grand-chose, mais pas de frein détecté à ce stade.

    Je pense que nous avons atteint une bonne taille d’équipe pour mener ce chantier. C’est sûr que nous sommes accaparés par tous nos sujets et en pleine croissance. Ça rajoute une difficulté supplémentaire mais ça sera structurant à bien des niveaux et notamment pour les relations entre collègues. Je ne souhaite pas différer ce sujet et c’est aussi pour cela que je ne tergiverse pas sur l’accompagnement et le coaching !

    Qu’est-ce qui te parait compatible à ce stade entre le statut de SCOP et Holacracy ?

    Vraiment je pense que tant qu’on fonctionnait à 4, nous n’avions pas besoin d’Holacracy. Avec d’autres collègues de SCOP, nous avons pas mal regardé ce qui se faisait ailleurs, car nous avons des attentes en matière de gouvernance partagée. C’est le point faible du mouvement des SCOP à mon sens. Et finalement qu’est-ce qui permet, au quotidien, de créer les conditions de l’implication ?

    Pour notre SCOP, je souhaite que chacun puisse participer à un fonctionnement démocratique et partager ses points de vue même avant d’être sociétaire. Nos sujets sont travaillés avec les salariés avant le vote des sociétaires, pour que les personnes soient concernées par la fabrication de la décision. C’est comme ça qu’on prépare chacun à devenir sociétaire. C’est un enjeu dans la vie quotidienne de notre SCOP.

    Je pense qu’Holacracy va nous apporter beaucoup en matière de fonctionnement pour créer les conditions de l’implication de chacun.

    De quoi as-tu envie pour la suite ?

    J’aimerais pouvoir échanger avec d’autres !
    Toute ma promo du DU de Paris Dauphine est au courant du chemin que nous prenons. Je partage aussi mon expérience dans le réseau des SCOP, notamment parce que mon bureau est dans la maison des SCOP de Rennes.

    Je pourrai montrer comment on travaille, ce qui fonctionne bien et moins bien. En restant toujours humble, notre équipe pourra partager cette expérience.

    Retrouver deux témoignages de leaders d’entreprises ayant adopté Holacracy :

     

    Crédit photo : Frédérique Jouvin.

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