Dirigeant de Comongo depuis 2016, année de sa création, Stéphane Labartino s’engage sur le chemin d’Holacracy quelques années plus tard avec son équipe. Comongo est une start-up grenobloise qui propose de faire évoluer l’image renvoyée par une entreprise grâce à l’analyse des ressentis. Ces données collectées permettent aux entreprises d’adapter leur stratégie de communication. Accompagnés depuis plus d’un an par Semawe, Stéphane et son équipe ont adopté Holacracy pour transformer leur organisation de travail.
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Comongo développe une solution d’analyse du ressenti qui aide les organisations à comprendre comment elles sont perçues, par des clients, des partenaires, ou des salariés. Ce qui permet d’identifier des vecteurs qui peuvent être porteurs dans la communication, ou dans le fonctionnement, et d’identifier des freins qu’il faut gommer. Nous sommes six actuellement à plein temps et cinq à temps partagés (personnes sous mandat).
Comment avez-vous décidé d’adopter Holacracy ?
Nous avons d’abord fait un an de formation : six mois d’accompagnement puis six mois de pratique en solo. Nous avons fait une seconde piqûre de rappel lors de cette dernière année.
Qu’est ce qui t’a convaincu d’adopter Holacracy ?
J’avais une expérience managériale dans le passé, et je ne voulais pas reproduire les modèles que j’ai connus, notamment lorsque j’ai eu un poste de directeur général, où j’ai vécu des échecs. J’ai eu un parcours universitaire également dans lequel j’ai fait beaucoup de recherches sur la communication managériale. Déjà en 2010 je me disais qu’il y avait mieux à faire.
Quelques années après la création de Comongo en 2015, j’annonce à mes actionnaires et à mes associées que nous n’allions pas manager de manière traditionnelle, que je voulais trouver une autre manière de fonctionner. Et c’est à cette époque que j’ai rencontré une associée de Semawe tout à fait par hasard. Je savais ce que faisait l’équipe de Semawe. Et l’histoire de transformation de cette Scop m’avait interpellé. A peu près six mois après cette rencontre, j’ai recontacté Semawe. Entre temps je m’étais renseigné sur les autres méthodes proposées: Opale, le livre de Laloux etc… Mais c’est cette proximité et cette confiance envers les associés de Semawe qui m’a convaincu.
Je savais par mes expériences que je n’aurais jamais les réponses à toutes les questions qui émergeraient au fil de la vie de Comongo, que je ne pourrais pas donner une ligne de conduite ou définir les plans d’action de chacun dans leur job. Il fallait donc que je trouve un moyen de travailler là-dessus, mais aussi un moyen de rassurer les gens dans le fait qu’ils puissent par eux-même, trouver des solutions. Et ça demande réellement une transformation du management, c’est-à-dire que tout ne pouvait plus venir seulement de la direction de l’entreprise.
Qu’est-ce qui a changé dans la communication au sein de l’équipe ?
A Comongo, il y a une envie partagée par tous de travailler ensemble, c’est une posture que l’on a toujours eu, et Holacracy a permis de nous donner une méthode d’écoute. C’est très différent de se dire “j’écoute et je débats”, et de se dire” j’écoute et je fais construire l’autre” : je l’aide à se construire, je le mets dans une position où il va pousser la réflexion plus loin. La méthode que propose Holacracy a beaucoup aidé dans ce sens, à condition de faire confiance. Donc il fallait aussi lâcher prise, accepter d’apprendre une méthode de gouvernance, d’échange et de travail inédite pour chacun de nous.
Dans mon équipe, je me suis retrouvé avec des personnes (les plus âgées) qui considéraient Holacracy comme un truc de hippies, pas adapté au monde de l’entreprise, et d’autres (les plus jeunes) qui attendaient qu’on leur dise quoi faire. Ces deux cultures aujourd’hui savent exactement où elles vont, sont très bien organisées, le système est clair pour tout le monde. Chacun a ses projets, ses tâches. Ça donne une feuille de route sur la semaine, sur le mois ou même quotidienne. Celles et ceux qui attendaient les instructions arrivent à réaliser que par eux même ils parviennent à tracer le chemin. Et les autres qui craignaient une liberté à outrance, y voient une manière de travailler portée par une communication non violente, plus constructive que jamais.
Quel intérêt d’apporter de la visibilité sur le travail et la gouvernance dans l’organisation ?
Tout est clair, tout est lisible, d’un coup les équipes réalisent qu’il n’y a aucun tabou, il n’y a plus de faux-semblant, de violence, de critiques: il y a juste les « pour quoi” (le sens), le “comment” et le “construisons ensemble”. Il y a aussi cette prise de conscience qu’ils peuvent poser toutes les questions qu’ils veulent et cette liberté pour moi de leur dire que je n’ai pas toutes les réponses. Donc aidez-moi à les trouver.
Quel était le challenge dans tout ça ?
Le challenge était de faire travailler des gens, en leur donnant un sens tous les jours, d’abord pour eux, et qu’ils participent au projet commun. Holacracy donne plus de pouvoir aux individus, et cette position là les fait progresser énormément, ils gagnent en expérience, en autonomie beaucoup plus vite que dans une entreprise traditionnelle.
J’ai une ambition dans ce projet, et l’équipe partage cette même vision, c’est que notre projet de start-up a une fin, c’est-à-dire que notre ambition est de vendre notre technologie à une organisation qui pourra la déployer au niveau mondial. Mais quand les salariés sortiront, ils sortiront avec un bagage qui les mettra au-dessus de la pile, qui les rendra incontestables sur le marché du travail. Et à la fin, ils auront le choix de monter leur propre business, d’aller où ils veulent, de rester avec l’acquéreur s’ils le souhaitent, ils auront plus de facilités pour trouver du travail par la suite qu’en temps normal.
Il y a encore des individus qui doutent dans leur travail. La méthode nous aide à lever ces doutes. Lorsqu’une personne doute d’elle-même, lorsqu’elle se sent un peu perdue, on peut mettre en place un environnement dans lequel la personne peut en parler pleinement, avec des pistes de travail qui peuvent l’aider à y trouver du sens. Cela montre que l’on est capable de mettre les moyens pour que la personne trouve une meilleure place, pour qu’elle se réalise plus, et si elle se réalise plus, cela servira le projet. Ma grande victoire à la fin ne sera pas seulement de vendre notre société, mais de voir que l’on a pu monter quelque chose, avec des individus qui ont gagné en maturité comme ils n’auraient jamais pu gagner autant ailleurs.
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