1 associé.e = 1 voix
C’est la base, la règle qui précède les autres, celle qui constitue une révolution dans l’univers capitalistique des statuts d’entreprise. A l’âge de 9 ans, nous avons collectivement opéré une transformation de Semawe qui était jusque là une SAS, dont j’étais, comme dirigeant, le seul actionnaire. Une gestation de 9 mois nous a conduit jusqu’à aujourd’hui, avec la naissance d’une SCOP réunissant tous les salariés de l’agence.
Nous avons fait le choix du statut coopératif pour mettre en cohérence une pratique du travail et des prises de décision en concertation, avec la propriété juridique de l’objet “entreprise”.
Pour prendre une image, il paraîtrait incongru dans une démocratie que le Président d’un pays en soit le propriétaire… La Coopérative fait entrer dans l’entreprise les principes fondamentaux de la démocratie.
C’est ainsi que nous avons choisi d’être une coopérative, sans pour autant que cela implique dans l’immédiat un changement de direction.
Les statuts
La première phase concrète de la transformation de l’entreprise fut le travail collectif sur la rédaction de nos statuts de coopérative. Une SCOP est une entreprise comme une autre, à laquelle s’applique en plus des règles spécifiques aux SCOP, c’est une surcouche juridique en quelque sorte !
Ainsi Semawe demeure une SAS, seulement ce sera dorénavant une SAS SCOP. La préparation des statuts de l’entreprise a été un travail assez long. Nous avons pris le temps nécessaire pour que chacun.e puisse s’approprier les notions juridiques, de gouvernance, de responsabilité qui sont essentielles pour procéder à des choix éclairés sur les grandes options qui se posaient à nous en terme de fonctionnement, de co-décision etc.
Rédiger des statuts, c’est aussi imaginer toutes les situations problématiques, périlleuses, dangereuses pour une entreprise. Pas facile de démarrer sa vie d’associé.e en abordant ces questions là. Et en même temps, quel meilleur moyen que de bien mesurer la signification du geste ?! Devenir associé.e d’une entreprise, c’est bien plus que déposer quelques milliers d’euros sur un compte en banque !
La Gouvernance
Pour couper court aux idées reçues sur les SCOP, une coopérative n’est pas obligatoirement une entreprise dans laquelle tout le monde décide de tout, tout le temps ! De ce point de vue là, le passage en coopérative n’a pas réellement changé la structure de notre gouvernance.
Consensus sur les orientations
Nous avons une pratique du consensus sur toutes les grandes décisions et orientations importantes de l’entreprise. Le vote, souvent associé automatiquement à l’idée de démocratie, n’a pas sa place chez Semawe. Nous considérons qu’à notre échelle, le vote est un mode de décision qui comporte trop d’inconvénients. Un vote permet à une majorité de prendre des décisions. Cela suppose naturellement qu’il puisse exister une minorité en désaccord total avec ces décisions. Cela nous paraîtrait mettre en péril l’équilibre harmonieux d’une équipe de travail. Donc nous prenons nos décisions par consensus, et dans les rares cas où ce fut nécessaire, par la méthode du consentement.
Rôles asymétriques dans la gestion
Dans le quotidien de la vie de l’entreprise, je reste le PDG de la SAS avec les responsabilités, droits et devoirs qui vont avec ce mandat social. C’est-à-dire que je prends certaines décisions en dernier ressort, signe les contrats de travail, engage l’entreprise en tant que mandataire. Engagement que je prends toujours en concertation avec l’équipe. Mais il y a une différence entre prendre des décisions en concertation, et “décider ensemble”. Car la décision collective supposerait une responsabilité collective, qui juridiquement a ses limites. Un mandataire social porte toujours des responsabilités pour le compte de la personne morale, qui ne sont pas partagées avec les associé.e.s.
Tou.te.s les salarié.e.s associé.e.s
Nous avons choisi dans nos statuts de SCOP, de prévoir que tous les salarié.e.s aient vocation à devenir associé.e.s. C’est important car cela veut dire que nous souhaitons garder une équipe très cohérente sur le plan des valeurs et avec une implication bien partagée, sans qu’il y ait de sous-groupes dans l’entreprise.
Etre associé.e, cela veut dire détenir au moins quelques parts dans le capital de la SAS, être informé.e des détails de la vie gestionnaire et financière de l’entreprise, et surtout, participer aux assemblées générales annuelles. C’est en particulier lors de ces AG que s’exerce le rôle d’associé.e en terme de pouvoir d’action et de co-décision. L’acte le plus fort est la désignation du président ou de la présidente de la société, élu.e pour 4 ans à la majorité qualifiée des voix. L’assemblée générale détient y compris un pouvoir de révocation du mandat social.
Ce point porte une charge symbolique importante dans une SCOP. C’est ce pouvoir des associé.e.s sur leur.e mandataire social.e qui donne toute la légitimité à un.e président.e. Etre élu.e sur la base d’un.e associé.e = une voix n’a pas la même signification qu’une auto-désignation en tant que propriétaire des parts de l’entreprise !
Et pour répondre à une autre idée reçue sur les SCOP, oui, ce système de désignation permet d’assurer une très longue stabilité des dirigeant.e.s des SCOP, puisqu’elle est même de 20 ans en moyenne.
Changements de posture
Au quotidien, pas de grand changement pour une équipe qui fonctionnait déjà sur le modèle de l’entreprise libérée depuis plusieurs années. Mais progressivement, une prise de conscience aiguise la perception d’un changement symbolique très fort. Les attentes des un.e.s envers les autres se sont déplacées. En tant qu’associé.e.s, nous avons une exigence plus élevée d’authenticité, d’implication, de responsabilité des individus à l’intérieur du collectif. Inversement, nous avons augmenté notre niveau d’attention envers le bien-être de chacun.e, puisque plus encore qu’avant notre SCOP, notre avenir commun en dépend.
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